Pleure pas, Léonard, pleure pas,
j'ai entendu ta voix, j'ai vu ton regard et je t'ai promis de te sortir d'ici...
Pleurez pas, vous les noirs, vous les taulards...
Je vous ai tous vus, je vous ai tous entendus, au point que je n'en dors plus, au point que j'en fais même des cauchemars.
Pleure pas, Léonard, je te l'ai promis cette nouvelle vie et j'ai compris ce fameux jeudi soir que je ne pourrai plus jamais entrer dans le hangar si je ne tenais pas la promesse que je vous ai faite de tous vous sortir d'ici, vous les sans-espoir..
Je sais, Léonard, tu es un bon galgo, je sais que ça fait plus d'un an que tu croupis ici et j'aurai tant voulu être celui qui a pris cette photo comme pour ne jamais oublier ton regard.
Pleure pas, Léonard, je sais mieux que personne que tu n'as rien fait pour mériter cela, tu es juste un galgo noir et tu dois aujourd'hui en payer le prix
Je sais, Léonard, je sais que tu es doux comme un agneau, je sais tout ça, que tu t'entends parfaitement avec les chats et avec tes copains chiens, c'est juste des humains dont tu as encore peur ...
Et je te comprends si bien.... À bientôt, merveilleux galgo.
C’était lors de mon dernier voyage en Espagne en avril, je ne peux pas expliquer ce qu’il s’est passé, mais j’ai été bouleversée plus que les autres fois.Quand on arrive pour la première fois à la Fondation Benjamin Mehnert on est agréablement surpris par le calme qui y règne, on peut même dire que c’est joli…
Ça, c’est la première impression...
Alors on longe tranquillement cette allée principale, il y a de grands paddocks extérieurs, où quelques chiens s’ébattent, pas forcément des galgos, alors on s’arrête pour caresser les museaux de ceux qui viennent nous solliciter. Puis on rencontre les employés, qui s’affairent durant toute la journée, ils sont aimables et ne manquent jamais de nous saluer. C’est très grand ici et le travail ne manque pas.
On est ici dans le plus grand centre de récupération de galgos du sud de l’Espagne, ils étaient près de 800 cet hiver.
Puis on passe devant l’infirmerie, et là un regard suffit et le ton est donné. C’est le bal des cassés, alors bien sûr on se précipite à leur rencontre, celui-ci avec une patte fracturés, celui-là avec le corps recousu tout entier, il ne faut pas demander : il s’est fait attaquer par les autres chiens.
Oui, c’est comme cela dans les refuges, c’est la loi du plus fort, c’est la faute à la promiscuité.
Et puis il y a cette immense porte verte qui commence à rouiller, et on entend des aboiements plus ou moins forts, plus ou moins hurlants, tout dépend du moment de la journée, parfois c’est calme, parfois ça l’est moins, parfois c’est terrifiant, la première fois c’est traumatisant.
Quand on pousse la porte, il y a les chenils extérieurs, un à droite, un à gauche,
alors on s’y enfonce et on commence à comprendre qu’une bagarre peut très vite éclater, pour rien juste parce que l’on passe, alors il ne faut pas trop s’attarder.
On continue notre chemin sans savoir ce qui nous attend dans ce grand hangar, et là les hurlements des chiens deviennent terrifiants, on ne s’entend plus, on est obligé de hurler comme eux pour se parler.
Alors on s’avance avec une grosse boule au ventre et on longe les allées, il y en a 6 au total avec des box de chaque côté. Des galgos, en veux-tu en voilà, certains se jettent sur les grilles, d’autres se cachent dans leur panier en plastique parce qu’ils sont terrifiés, d’autres restent stoïques parce qu’ils sont habitués et qu’ils n’espèrent plus rien.
Ce sont ceux que j’ai appelés les taulards, ceux qui purgent de lourdes peines, souvent parce qu’ils sont noirs ou traumatisés par leur lourd passé de maltraitance, certains sont là depuis plus de deux ans, ils sont du cru 2014.
Mais cela on ne le sait pas la première fois, lorsque l’on rentre dans le hangar, non, on n’imagine pas que certains chiens vivent ici depuis des années.
Ils ne manquent de rien, ils mangent à leur faim, même trop puisqu’ici la nourriture est en libre-service afin d’éviter les conflits, alors ils grossissent, ils n’ont que ça à faire : manger et attendre l’heure de la récré, c’est le matin lorsque les employés arrivent avec leur jet pour nettoyer et désinfecter.
Tout est bien organisé, bien orchestré, la machine est bien huilée, les groupes sont formés et c’est chacun à son tour, toujours dans les mêmes paddocks, impossible ici de se tromper, impossible de les mélanger, ce seraient des bagarres assurées.
On évite d’y aller dans ces moments-là afin de ne pas gêner l’organisation des employés.
Je voudrais vous faire sentir l’angoisse de la première fois pour que vous compreniez ce que vivent ces chiens qui y sont enfermés depuis des années.
Quand on ressort du hangar on n’est plus pareil, la tête tourne, on a envie de vomir parfois, on est vidé, on pleure souvent et on se dit que rien n’y fera, que notre combat ne sert à rien, qu’on ne pourra jamais venir à bout du terrible martyre de ces chiens.
On se dit qu’on est si petit, on a presque envie de baisser les bras et puis on se dit que non, il ne faut pas les abandonner, on se dit qu’on va y arriver…
Voilà, bienvenue dans la prison dorée de ceux qui n’ont pas eu la chance d’être bien nés, soit bringés avec une taille de guêpe, soit sociables parce qu’ils n’ont pas été martyrisés ; non, ne vous y méprenez pas : ceux-là ne resteront pas, ils seront très vite réservés par les associations parce que très facilement adoptables, il y a de la demande pour ces galgos-là.
Mais les autres, les noirs, les mâles, les traumatisés, ceux-là vont payer le prix fort d’être mal nés, ils vont purger de longues peines.
Ceux-là vont morfler une deuxième fois, quelle ironie du sort quand on sait qu’on est là pour venir en aide aux galgos maltraités, pour dénoncer leur martyre.
Oui, ironie du sort : ce sont justement ceux-là que nous condamnons.
Ceux-là qui seront sacrifiés au nom de la « demande du marché ».
Ceux-là qui seront privés de liberté parce qu’ils ne correspondent pas au stéréotype souhaité par la majorité des candidats à l’adoption.
Nous sommes tous responsables du drame qui se joue là !!
C’est un cri du cœur que je lance aujourd’hui, un appel au secours, pour les taulards de la fondation Benjamin Mehnert.
Depuis mon dernier voyage en Espagne, ils hantent mes nuits, et c’est comme si j’avais aujourd’hui le devoir de les sortir de leur mouroir.
Non, le mot n’est pas trop fort, ils se meurent dans ces longs couloirs, ils se meurent de désespoir…
Certes ces galgos ne manquent de rien puisqu’ils sont nourris, à l’abri des coups et de toute forme d’humiliation, mais ils sont privés de liberté depuis des années
Ils croupissent dans les longs couloirs du hangar et sont devenus invisibles pour les associations partenaires de la fondation, au grand désespoir de tous les protecteurs qui y travaillent et qui croisent ces regards perdus chaque jour et depuis des années.
Non, sur ces photos vous ne verrez pas de sang, pas de fractures, mais leurs blessures sont à l’intérieur, celles de l’âme que vous ne voyez pas, celles qui sont invisibles.
J’ai fait une promesse à ces galgos, celle de tous les sortir d’ici et en aucun cas je ne pourrais aujourd’hui leur tourner les dos.
Les quelques nuits que nous avons passées à la FBM ont été un véritable cauchemar, ils hurlent toute la nuit, et le matin certains sont amenés à l’infirmerie, ensanglantés.
Rocio, la responsable du refuge, m’a remis la liste de tous ces condamnés à perpétuité, de ceux qui sont arrivés en 2014.
Chaque fois que j’y vais je leur donne la priorité, mais le problème, c’est que nous ne pouvons pas tous les réserver parce qu’en France nous avons beaucoup de mal à les faire adopter.
Ils ne sont pas prisés à l’adoption, les mâles noirs et de surcroît traumatisés ou timides.
Bien souvent ils vont rester de longs mois en famille d’accueil, on en a un en ce moment que personne ne regarde, un ancien taulard, Moreno, il est arrivé en janvier…
http://www.levriers-sans-frontieres.com/album/moreno/
Alors il m’est venue une idée, et nous en avons parlé avec Rocio : les mettre en avant, parler d’eux et surtout sensibiliser les associations partenaires de la FBM.
Refaire des photos, refaire les tests chats, refaire une évaluation comportementale, en gros les remettre au goût du jour, un peu comme quand on ressort un vieux stock, on dépoussière, on astique pour appâter le client !!
Pathétique, mon humour, non ?
Peut-être… mais rien ne sert de pleurnicher, et c’est si facile…
Alors Rocio a demandé à un photographe professionnel sympathisant de la Fondation de venir les prendre en photo pour qu’ils soient beaux, pour qu’ils soient enfin mis en lumière, comme des stars…
Et regardez-moi ces regards de désespoir !!
Ça a marché puisqu’une association italienne et une association américaine en ont déjà sorti quelques-uns.
Je les en remercie.
Ceux que je vous présente aujourd’hui sont du cru 2014, ils sont au nombre de 14 justement et seront bientôt tous proposés à l’adoption sur notre site dans la nouvelle rubrique « les galgos qui n’ont plus d’espoir ».
Ils restent également disponibles sur le fichier de la FBM afin de ne pas les pénaliser au cas où d’autres associations auraient des opportunités pour certains d’entre eux.
Certains remonteront lors de notre transport de la rentrée prévu le 17 septembre, et j’espère que bon nombre d’entre eux seront adoptés.
ATTENTION : le but n’est pas de vous faire craquer, une adoption doit être réfléchie, inutile de vous précipiter sur vos claviers et de remplir le formulaire si vous savez pertinemment que vous n’y donnerez pas suite.
Merci de diffuser un maximum cet article pour les taulards de la Fondation Benjamin Mehnert qui sont au nombre de 14 arrivés en 2014 et qui doivent impérativement retrouver la liberté avant la fin de l’année.
http://www.levriers-sans-frontieres.com/
Merci de m’avoir lue jusqu’au bout, j’ai été longue aujourd’hui…
Formulaire de demande d’adoption en ligne.
http://www.jotform.co/form/33494167753867
Contact Odile 0325375828 / 0660153758